mercredi 24 mars 2010

"Ecouter le message des électeurs"

Ils étaient touchants (??) les porte-parole de notre majorité présidentielle, dimanche soir, sur les plateau de télé, à commenter les résultats de leur non-victoire* électorale.
Ils en pleurnichaient presque (de façon très intériorisée, certes), sur le mode "les électeurs sont ingrats, après tout ce qu'on a fait pour eux!" inauguré il y a quelques temps par une candidate aux présidentielles. Visiblement, ils répétaient tous le même plan de communication, sur le thème: "Ces élections ont eu lieu dans un contexte économique très difficile pour nous... bla bla bla... crise mondiale.... Ils nous ont sanctionné alors que la France a mieux résisté à la crise que ses voisins." Sous-entendu, bien sûr,"grâce à nous".

Bizarrement, les français, votants ou abstentionnistes, n'ont pas l'air d'avoir la même lecture qu'eux de la situation. D'abord, pour beaucoup, "mieux que les voisins, na na na na nère", ça leur fait une belle jambe car ça ne change rien à la difficulté de leur situation et à leur désespoir, même si visiblement ça fait du bien à l'ego de nos ministres ravis de pisser plus loin que leurs confrères. Et puis (sont-ils bêtes!), beaucoup se tiennent le raisonnement suivant:
Quels sont les voisins qui ont le plus souffert de la crise, à part les grecs, dont ici on ne sait pas grand chose ? Les irlandais, les islandais, les anglais. Bref, ceux qui se sont lancés avant nous et avec un enthousiasme tout sarkozyien dans le modèle économico-social de capitalisme financier et de dé-régulation que notre majorité essaie d'implanter chez nous parce que c'est ça qui rend moderne et compétitif et vachement mieux dans l'économie mondiale.
Donc, concluent-ils dans leur grossière naïveté, si la France a mieux résisté, c'est parce que notre gouvernement n'a pas eu le temps d'aller aussi loin qu' eux. Qu'elle a été protégée par cet affreux modèle archaïque et dépassé issu du Conseil National de la Résistance (services publics forts, politique économique d'investissement et de régulation des marchés, grands organismes de recherche non soumis aux fluctuations des modes, etc.) que Sarkozy et ses copains n'ont pas encore réussi à démanteler tout à fait. Et qu'au lieu de copier les voisins, on ferait mieux de réformer en gardant nos valeurs de base. Un analyste superficiel et écervelé pourrait même se dire que des électeurs de l'UMP tendance, disons, séguinistes ou "gaullisme social", ont fait le même raisonnement et en conséquence se sont abstenus (z'allaient pas voter pour Dani-le-rouge, faut pas pousser!); que d'autres, de tous poils, se sont dit que si l'Europe c'était copier les-dits voisins, Le Pen, il avait pas tort de critiquer l'Europe -- et d'autres encore, avec un point de départ identique mais une conclusion différente, que Les Verts et certains politiques de gauche, ils n'avaient pas tort de dire qu'il fallait de l'Europe mais pas alignée sur les islandais, les anglais etc.
Bref, la crise et son air-bag français les a convaincus que la politique de la majorité, c'était le problème et pas la solution. Les électeurs sont bêtes, aveugles, incultes, ingrats.
Et peut-être même influençables: ont leur a demandé de réfléchir sur l'identité nationale pour la revivifier. Bêtement encore, ils ont donc repris ce qui est supposé la synthétiser: "Liberté, Egalité, Fraternité". Et se sont dit que "égalité" et "fraternité", ça n'avait pas grand chose à voir avec "compétition", "maillon faible", "je vous emmerde", "s'ils crèvent c'est qu'ils sont nuls", "je vais pas payer des impôts et renoncer à ma Rollex pour aider ceux qui galèrent, ces profiteurs".
Bref, y'a du boulot.

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